La feuille de route du Gouvernement pour l’économie circulaire sera publiée dans les jours à venir. Elle comporte des mesures bienvenues pour améliorer la durabilité de nos produits. En effet, la Secrétaire d’Etat a repris plusieurs propositions que HOP a portées grâce à son activité de lobbying citoyen en lien avec d’autres associations. Si l’association HOP accueille favorablement ces avancées, elle appelle le Gouvernement à renforcer les mesures annoncées sur deux axes: la réparation avec une meilleure conception des produits et l’information du consommateur.
Une feuille de route pour orienter les politiques publiques de l’économie circulaire
Notre modèle économique actuel qui repose sur le schéma linéaire extraire – produire – consommer – jeter n’est plus soutenable. L’économie circulaire désigne un modèle de production et de consommation alternatif avec une utilisation plus efficace des ressources et un impact moindre sur l’environnement. Pour éviter les pollutions et déchets, les produits doivent être utilisés longtemps, réemployés (troqués, donnés, revendus…), réparés. Aussi, l’enjeu de leur durabilité et de leur réparabilité est un préalable à toute volonté d’aller dans le sens de l’économie circulaire, dont le recyclage n’est que le levier final !
Le nouveau Gouvernement a l’ambition de faire de la France un leader mondial de l’économie circulaire. Dès octobre 2017, le ministère de la Transition écologique et solidaire a donc lancé les travaux d’élaboration des mesures d’économie circulaire en lien avec les parties prenantes (associations, collectivités, entreprises…). Ces discussions aboutiront dans les jours à venir à la publication d’une feuille de route.
Les orientations fixées par ce document étant importantes pour la suite, HOP a pris une part active à son élaboration et a porté ses propositions, qui ont été en partie reprises.
Des mesures encourageantes pour l’allongement de la durée de vie des produits
Sur les objectifs poursuivis, HOP accueille favorablement les orientations retenues par le Gouvernement pour répondre à l’enjeu de l’obsolescence programmée, et se félicite que certaines de ses propositions aient été entendues.
Ainsi, l’affichage de la durabilité, l’obligation de fourniture de pièces détachées d’occasion, l’allongement de la garantie légale sur certains produits figureront dans la feuille de route.
HOP considère cependant que les mesures proposées manquent d’ambition pour favoriser un réel allongement de la durée de vie des produits. En effet, pour remplir pleinement son rôle, l’Etat doit s’autoriser à utiliser le levier fiscal (incitations financières) et normatif (interdictions/obligations).
A quelques jours de la publication de la feuille de route, HOP rappelle donc ses principales propositions pour favoriser l’allongement de la durée de vie des produits. Celles-ci constitueront le passage à l’échelle promis par le Gouvernement et auront un impact sur la vie quotidienne des consommateurs. Elles s’articulent autour de 3 priorités :
- L’affichage obligatoire de la durabilité des produits en 2020,
- Une mesure à caractère financier pour les activités de réparation,
- Une garantie légale appliquée et étendue.
HOP appelle à renforcer le soutien à la réparation, enjeu central de la lutte contre l’obsolescence programmée et quasi-absent des mesures annoncées.
Associations et entreprises appellent à renforcer les mesures de soutien à la réparation
Baisse des emplois, coût élevé de la réparation pour les consommateurs, indisponibilité des pièces détachées… Le secteur de la réparation est confronté à des difficultés croissantes qui compromettent sa survie. Il est pourtant essentiel de le soutenir pour allonger la durée de vie des produits. Face à cette situation, les quelques mesures annoncées à ce stade par le Gouvernement – affichage volontaire de la réparabilité des produits et création d’une cartographie des réparateurs – nous semblent insuffisantes.
C’est pour proposer des mesures concrètes et incitatives que HOP s’est associée à d’autres associations et entreprises dans une lettre ouverte de soutien à la réparation.
Plusieurs mesures y sont précisées :
- La mise en place d’une TVA à taux réduit pour les activités de réparation,
- Le déploiement d’un soutien financier pour faciliter la réparation au consommateur,
- L’amélioration de la disponibilité des pièces détachées et l’information sur celles-ci.
Créer un fonds dédié à la réparation : Vers un droit à la réparation pour tous ?
Pourquoi les citoyens ne réparent pas davantage ? Manque de compétences, manque de pièces détachées accessibles, manque de confiance dans les réparateurs, réparation trop chère par rapport au prix du neuf… Les raisons sont nombreuses, mais des solutions sont possibles.
Hop soutient l’idée d’un fonds dédié à la réparation. Tout client qui se rendrait chez un réparateur labellisé par le Gouvernement aurait le droit à une réduction sur le prix de la réparation (par exemple 50 % du total, dans la limite de 200 € de réparation). Le manque à gagner serait versé au réparateur par le fonds réparation, financé par les entreprises. Ces réparateurs labellisés pourraient fournir des services attractifs (devis gratuit, garantie de la réparation pendant 6 mois minimum…). En retour, les réparateurs s’engageraient à exercer une activité de proximité et à respecter un certain montant de marge. Conformément à leur rôle de conseillers, ils pourraient aussi servir de relais à la communication des pouvoirs publics sur les bons gestes d’entretien des produits.
Ce dispositif serait financé par un fléchage de l’éco-contribution vers un fonds dédié à la réparation. Le montant de l’éco-contribution serait plus ou moins élevé selon les pratiques des fabricants : disponibilité des notices et des outils, modularité des produits, disponibilité des pièces détachées…
Une telle mesure permettrait de faire baisser sensiblement le coût de la réparation tout en restaurant la confiance du citoyen envers le professionnel dont la qualité des services aurait été vérifiée.
Des mesures plus ambitieuses nécessaires pour améliorer l’information du consommateur
Rendre obligatoire l’affichage de la durabilité pour avoir un véritable impact sur la vie quotidienne des consommateurs
Concernant l’affichage de la durabilité des produits, la formulation de la pré-feuille de route mériterait d’être clarifiée : pour le moment, elle propose l’affichage “sur une base volontaire d’ici 2020”. Il est essentiel de préciser que l’affichage de la durabilité serait ensuite obligatoire.
Faire de l’éco-conception un moyen d’éclairer le choix des consommateurs
En outre, HOP appelle à davantage de transparence sur l’éco-conception, afin que les consommateurs soient mieux informés pour s’orienter vers des produits durables.
Dans le cadre des filières REP, les producteurs (et in fine les consommateurs) paient une contribution au traitement des déchets. En fonction du respect de certains critères environnementaux, cette éco-contribution est plus ou moins importante. Ce mécanisme s’appelle l’éco-modulation : il vise à encourager les bonnes pratiques en récompensant des modes de production plus respectueux de l’environnement par un bonus, et à l’inverse en décourageant une production moins durable par un malus.
Si l’éco-modulation est un mécanisme intéressant pour promouvoir l’éco-conception, il mériterait d’être rendu beaucoup plus transparent pour réaliser pleinement son potentiel.
Communiquer sur les critères d’attribution de l’éco-modulation et sur leurs résultats, c’est-à-dire sur le montant des bonus/malus attribué aux marques ou aux produits, donnerait la possibilité aux organisations compétentes d’établir des classements de marques, et ainsi de distinguer celles qui agissent pour allonger la durée de vie de leurs produits. Le consommateur pourrait donc faire un choix éclairé en connaissant les produits les plus durables. Aujourd’hui, une différence de quelques centimes de malus entre un produit conçu pour durer et un produit prêt-à-jeter n’est pas suffisante pour inciter les entreprises à s’améliorer. Par contre, elles seront certainement attentives à l’image de marque que renvoie un classement par produits !
Développer le compteur d’usage pour stimuler le marché de l’occasion
Nos voitures affichent un compteur kilométrique : cette information renforce la valeur marchande du produit et en facilite la revente à un prix adapté. La même obligation pourrait être dupliquée pour d’autres produits « durables » : machine à laver, ordinateur, télévision… Afficher un compteur d’usage adapté à l’appareil (heures, cycles…) est une mesure importante : elle permettrait de développer le marché de l’occasion et de la réparation pour l’ensemble des produits.
Faciliter la disponibilité des pièces détachées en réécrivant le décret
Comme HOP le soutenait déjà en 2016, il est indispensable de réécrire le décret sur l’affichage de la durée de disponibilité des pièces détachées.
En effet, depuis le 1er mars 2015, les distributeurs et les fabricants sont tenus d’afficher la durée pendant laquelle ils s’engagent à fournir les pièces détachées des biens qu’ils commercialisent. Cependant, le décret d’application ne respecte pas l’esprit de la loi : il ne rend pas obligatoire cette information lorsque les pièces sont indisponibles.
HOP, soutenue par plusieurs associations de consommateurs et de protection de l’environnement, a appelé les pouvoirs publics à modifier ce décret: au cours de la campagne présidentielle, le candidat E. Macron s’était ainsi engagé à “faciliter la modification du décret qui n’est actuellement pas assez précis”. Le Gouvernement n’a cependant toujours pas concrétisé cet engagement.
Appliquer la garantie légale de conformité pour mieux protéger les consommateurs
Il existe dans la loi depuis 2016 une garantie légale de conformité : celle-ci s’applique pour les produits pour une durée de deux ans. Théoriquement, le consommateur peut donc faire réparer son bien gratuitement ou se faire rembourser s’il constate un défaut de conformité.
Néanmoins, l’application de la garantie laisse à désirer : il est très difficile pour les consommateurs de la faire jouer, alors même que la garantie constitue le premier levier pour se prémunir de l’obsolescence programmée à l’échelle individuelle.
En effet, la plupart des consommateurs ne connaissent aujourd’hui pas l’existence de cette garantie, et de nombreux distributeurs refusent de l’appliquer.
Face aux entreprises qui ne respectent pas la garantie légale de conformité, les consommateurs doivent pouvoir s’informer et se défendre. C’est pourquoi HOP insiste sur la nécessité de clarifier le site internet de la DGCCRF, et de mettre en place un véritable portail de plainte facilement accessible pour non-application du droit à la garantie. Grâce à ce portail, la DGCCRF pourrait centraliser les plaintes et les traiter plus aisément.
Les citoyens sont en droit d’attendre de réelles avancées pour lutter contre l’obsolescence programmée. Si les responsabilités sont partagées entre consommateurs et entreprises, ces dernières doivent être incitées à mieux produire, de manière plus durable et réparable. C’est à cette condition que les consommateurs pourront alors mieux choisir.
A la veille de la publication de la feuille de route, HOP renforce son travail de lobbying citoyen pour faire inscrire ses propositions dans la feuille de route : faire de la France un leader mondial de l’économie circulaire ne sera possible qu’en faisant de l’allongement de la durée de vie des produits une priorité.