Aux Etats-Unis, des dizaines d’Etats ont initié des projets pour faciliter la réparation des appareils au bénéfice des consommateurs et des établissements d’enseignements, mais les compagnies technologiques s’emploient à les torpiller. HOP revient sur ces évènements.
Marc Bergen, journaliste spécialisé pour le groupe Bloomberg Technology, a publié un article il y a quelques semaines dénonçant l’acharnement des grands groupes technologiques tels que Google, Microsoft, Amazon, Apple, suivis en cela par de nombreuses autres entreprises technologiques (fabricants de téléphonie, d’appareils ménagers et dispositifs médicaux…) à torpiller les initiatives législatives visant à garantir le « droit de réparer » des appareils technologiques.
Toutes ces entreprises réservent l’accès aux pièces détachées et aux schémas techniques à leurs réparateurs agréés, obligeant les réparateurs indépendants à user de subterfuges pour se procurer avec difficultés les pièces nécessaires. Ceux-ci sont parfois dans l’impossibilité de réparer, notamment quand des pièces propriétaires, aussi simples que des ports USB, des batteries ou des ventilateurs sont introuvables. Situation hautement dommageable notamment pour les étudiants et les établissements d’enseignement, surtout dans cette période de pandémie où Ipads, Chromebooks et autres portables sont devenus des instruments essentiels pour l’enseignement.
Nombre de réparateurs indépendants se sont groupés en réseaux de petits réparateurs et de militants qui poussent des projets de lois visant à supprimer les pratiques qui restreignent le droit de réparer à des réparateurs agréés, et ce pour une vaste gamme de produits qui va de la liseuse « Kindle » au fauteuil roulant. Les organisations de consommateurs prennent exemple sur une loi promulguée au Massachusetts en 2012, qui impose aux constructeurs automobiles de donner accès aux informations relatives à la réparation de leurs véhicules aux réparateurs indépendants et non affiliés. Ces organisations militent pour une loi similaire pour les produits électroniques, les ventilateurs et l’équipement agricole, mais sans succès jusqu’à présent.
Les entreprises technologiques citées ci-dessus s’y opposent, avec toute la puissance de leurs lobbyistes, arguant des dangers que susciterait une telle ouverture pour la propriété intellectuelle, la protection des données sensibles et la sécurité du consommateur.
Les organisations de consommateurs contestent ces affirmations et dénoncent les véritables motivations : forcer les consommateurs à payer des réparations coûteuses ou acheter des produits neufs. La Federal Trade Commission (FTC) elle-même a déposé un rapport au Congrès déclarant que le système actuel est un obstacle à la concurrence et au développement économique dans les zones à bas revenus. Elle note que la pandémie a encore accentué les freins à la réparation, notamment eu égard à la pénurie d’ordinateurs portables, et que les justifications avancées par les constructeurs ne reposent sur aucune preuve.
Pourtant le lobbying des groupes technologiques se révèle efficace puisque, alors que 27 Etats américains ont envisagé des lois en faveur de la réparation en 2021, l’immense a été rejetée. La situation devrait encore évoluer, puisque Joe Biden a signé un décret la semaine dernière. Dans ce décret, il demande à la Federal Trade Commission (FTC) de lui proposer des règles, afin de s’attaquer aux pratiques mises en places par les grands fabricants limitant la réparation de leurs produits par des réparateurs tiers ou l’autoréparation. Néanmoins, l’élaboration de nouvelles règles par la FTC peut prendre beaucoup de temps.
Le bras de fer continue donc.
HOP remercie Patrice, bénévole, pour sa précieuse contribution à cet article.