Qu’elle soit esthétique, technologique, technique ou logicielle, l’obsolescence programmée regroupe l’ensemble des techniques visant à réduire délibérément la durée de vie ou d’utilisation d’un produit afin d’en augmenter le taux de remplacement. Elle est devenue l’outil de plus en plus répandu d’une société de consommation insoutenable. En plus de déposséder les individus de leurs droits à un usage durable des biens, ce système de production et de consommation s’appuie sur une extraction de matières premières, d’exploitation de terres et de ressources qui arrive à ses limites.
Conscients des enjeux de moyen et long terme au niveau climatique, environnemental, géopolitique, social et sanitaire, nous voulons réfléchir et agir pour concevoir le monde dans lequel nous voulons vivre. Face à l’absence d’action coordonnée contre l’obsolescence programmée, citoyen·nes, intellectuel·les, élu·es, fabricant·es, créatifs et tous ceux qui veulent mettre fin à l’obsolescence programmée s’unissent pour promouvoir une consommation responsable et un modèle économique global alternatif.
Le manifeste
I. Penser
Repenser ensemble notre système
L’obsolescence programmée est le symbole d’un problème plus global : celui d’une société du gaspillage, basée sur un modèle linéaire, productiviste et consumériste, non soutenable. L’association se donne pour mission de contribuer à dessiner les bases d’un nouveau projet de société. L’association a donc pour but d’observer, proposer et débattre des solutions systémiques, notamment grâce aux soutiens d’experts, d’intellectuels, d’entrepreneurs, et toutes autres personnes qualifiées. Elle offre ainsi des clefs de compréhension et d’analyse de l’obsolescence programmée, dans une démarche constructive.
Faire émerger un modèle économique, alternatif, écologique et social
La remise en cause du modèle économique dominant, fondé sur une production et consommation de masse qui requiert nécessairement un fort taux de remplacement des produits, s’accompagne d’une promotion des modèles économiques durables à long terme. En particulier, les modèles économiques basés sur l’usage des produits (économie de la fonctionnalité), sur un modèle de réutilisation des ressources (économie circulaire) ou sur la collaboration des acteurs pour une production plus efficiente (économie collaborative) sont promus. Toutefois, nous resterons vigilants aux possibles conséquences écologiques et sociales des modèles alternatifs à l’obsolescence programmée. Une juste redistribution des richesses, l’égalité sociale, la démocratie, la préservation de l’environnement doivent être au cœur des nouvelles solutions.
II. Informer
Protéger et informer le citoyen
L’obsolescence programmée, technique et logicielle porte atteinte directement aux droits des consommateurs, victimes des produits conçus pour ne pas durer ou ne plus fonctionner normalement. Les informations concernant la réparabilité des produits, leurs durées de vie ou la garantie réelle du constructeur et du législateur sont souvent cachées à l’acheteur intentionnellement. Notre association vise à défendre le consommateur en lui offrant plus d’informations, en l’assistant dans sa démarche de consommation engagée, en facilitant l’accès à des solutions concrètes, et en l’aidant à se défendre contre les tromperies, notamment par des actions en justice. Il s’agit de défendre le droit à l’usage de produits durables pour tous.
Lutter contre l’obsolescence programmée culturelle
L’obsolescence programmée est le symbole de la société de consommation dans laquelle nous vivons. Celle-ci repose avant tout sur une construction sociale, écologiquement non durable. Nous avons pour objectif de favoriser la réduction des besoins, la “sobriété heureuse” ou “simplicité volontaire”. Nous dénonçons la société de sur-consommation qui repose sur la stimulation de désirs artificiels, orchestrée par des stratégies publicitaires, industrielles et commerciales peu scrupuleuses. Il s’agit aussi de lutter contre l’obsolescence esthétique et de favoriser les prises de consciences citoyennes face aux choix et responsabilités d’acheteurs. L’action de l’association ne peut ainsi se contenter de proposer des palliatifs écologiques ou technologiques aux conséquences de l’obsolescence programmée, mais vise un changement profond vis-à-vis de la culture consumériste.
III. Agir
Agir localement, avec les citoyens
Le système actuel repose sur la consommation, les clients jouent un rôle clef puisque les producteurs dépendent entièrement du comportement des acheteurs. Aussi, le rôle, la responsabilité et le pouvoir des citoyens ne doit pas être sous-estimé. Loin d’être impuissants, ils détiennent un véritable pouvoir d’action si, plutôt que d’être divisés et isolés, ceux-ci s’organisent et coopèrent pour changer les règles du jeu. Nous aspirons à sensibiliser et agréger le plus grand nombre pour favoriser l’émergence de nouveaux modèles de production et de consommation, tout en travaillant à stopper en parallèle les pratiques industrielles et commerciales d’obsolescence programmée. De nombreuses initiatives existent déjà, permettant de vivre selon d’autres modèles. En facilitant l’émergence de forums et groupes locaux, nous visons à amplifier l’impact de ces mouvements citoyens d’échange, de réflexion et de mise en réseau.
Fournir des outils pour agir localement, c’est permettre un changement immédiat dans la vie des citoyens. La mise en relation des talents et compétences de proximité permet des actions concrètes et a des répercussions sur un espace partagé familier. De plus, l’action locale retisse le lien social indispensable pour tout changement global.
Agir en justice contre les pratiques d’obsolescence programmée
Si les citoyens ont un rôle important à jouer, les fabricants et distributeurs qui favorisent l’obsolescence programmée doivent être dénoncés. Nous utiliserons et soutiendrons toutes les méthodes et outils pour mettre fin à ces pratiques malhonnêtes, notamment grâce aux médias et aux actions en justice. Il ne s’agit pas de diaboliser l’ensemble des entreprises qui peuvent aussi se sentir victimes des logiques économiques actuelles, mais de constater et agir en justice contre les abus. L’association Halte à l’Obsolescence Programmée considère le droit et la justice comme des leviers essentiels de l’accès à un mode de vie durable et de l’émergence du monde dans lequel nous voulons vivre.
Promouvoir l’innovation et les initiatives durables
De plus en plus de fabricants, entrepreneurs, ingénieurs et créatifs (notamment les designers, startup, fablab, etc.) produisent des solutions d’objets et de pratiques visant à s’affranchir de l’obsolescence programmée et investissent dans des solutions alternatives. Nous valorisons et encourageons les nouveaux modes de production durables et responsables. Notre association défend une idée du progrès, de l’innovation et de la technologie qui va dans le sens de progrès écologiques et sociaux réels.
Protéger l’environnement de l’obsolescence programmée
Le combat contre l’obsolescence programmée est également mû par la reconnaissance des dégâts écologiques de ce modèle. La surconsommation et la surproduction engendrées par ces stratagèmes produit une sur-abondance de déchets et de pollutions, ainsi qu’un réchauffement global du climat, insoutenables pour l’environnement comme pour la santé humaine. L’obsolescence programmée est un enjeu de salubrité et de santé environnementale au niveau international. En lien avec les acteurs de l’environnement, notamment associatifs, notre action vise à sensibiliser et agir pour protéger l’environnement et la santé humaine.
Accompagner les décideurs
L’observation, les propositions et l’expertise produites par l’association visent notamment à accompagner les décideurs publics, ce que nous encourageons par des activités de plaidoyer. Cet accompagnement peut aussi prendre la forme de formation et d’animation de groupes de travail, notamment à l’endroit des élus locaux, des acteurs publics ou des entreprises et entrepreneurs.
IV. S’organiser
Un fonctionnement innovant, ouvert et égalitaire
Proposer de réelles alternatives suppose une alliance des citoyens-consommateurs, des fabricants, des intellectuels et des politiques… Au sein de l’association, l’ensemble des acteurs sont mis sur un pied d’égalité et travaillent de façon collaborative.
Une association indépendante et non partisane
L’association Halte à l’Obsolescence Programmée est guidée par les valeurs d’indépendance, de transparence, d’action collective et pour le bien commun, de non-violence et de persévérance. Elle s’interdit globalement tout engagement moral, partisan, financier, religieux, syndical ou corporatiste.
L’association ne dépend d’aucun parti. Les enjeux qu’elle soulève se placent au-dessus des clivages politiciens. Si les décideurs politiques peuvent représenter des partenaires pour accomplir les objectifs fixés par l’association, cette dernière reste complètement indépendante dans ses prises de positions.