Pour ce rapport inédit sur l’impact du bonus réparation, HOP a interrogé 681 consommateur·rices et réparateur·rices. L’enquête atteste d’une attente, à la fois forte et frustrée, des consommateur·ices ainsi que d’importants freins pour l’obtention de la labellisation pour les réparateur·rices.
Des résultats décevants au regard de l’attente citoyenne envers le bonus réparation
Le bonus réparation est une mesure incitative prévue dans la loi AGEC qui permet aux consommateur·rices d’obtenir une réduction sur leur facture de réparation de certains équipements électriques et électroniques lorsqu’ils·elles se rendent chez un·e réparateur·rices labellisé·es “QualiRépar”. 89% des consommateur·rices cherchent des informations sur la réparation en cas de panne, tandis que 68% des consommateur·rices ne réparent pas à cause du prix (Ademe).
Selon l’étude de HOP, le fonds encourage à essayer de réparer pour une écrasante majorité de répondant·es. Toutefois, seulement la moitié connaissaient ce droit (47%).
Le bonus réparation est une avancée pour les consommateur·ices, et fait émerger de fortes attentes. Cependant, il est loin de répondre aux objectifs escomptés. Plus d’un an après son entrée en vigueur, les 165 000 réparations ayant bénéficié du bonus EEE représente une prise en charge de 4 millions d’euros. Un montant dépensé encore bien faible dans l’enveloppe de 63,24 millions d’euros prévue pour la période du 15 décembre 2022 au 31 décembre 2023. Alors que les textes réglementaires prévoient que les éco-organismes doivent allouer au moins ce montant dans le cadre du fonds réparation. Il n’a permis de couvrir que 0,2% des pannes hors garanties du parc électroménager et ne concerne que 21% des établissements de réparations de produits électroniques. Nous sommes loin des objectifs fixés par l’État, à savoir augmenter de 20% le nombre d’EEE réparés chaque année en France, pour atteindre 12 millions d’ici à 2027.
Les consommateur·ices demandent aussi l’éligibilité de pannes courantes, aujourd’hui encore exclues du bonus, comme les pannes logicielles d’ordinateurs (81%) ainsi que les défauts de pièces ou accessoires essentielles au bon fonctionnement du produit (95%).
Les raisons du manque de réparateur·ices malgré les bénéfices perçus par les professionnel·les
L’enquête met en lumière les lacunes du dispositif, ralenti par un déploiement bridé. Ce rapport sur le bonus réparation fait état d’une grande défiance des réparateur·ices. 80% des interrogé·es ne souhaitent pas se faire labelliser, car ils·elles considèrent que le processus est trop coûteux (pour 74% d’entre eux), trop complexe (pour 63%), trop chronophage (pour 34%).
Résultats : trop peu de réparateur·rices sont répertorié·es sur la cartographie du label Quali’Repar. Or, l’étude HOP révèle que pour 85% des consommateur·rices, la proximité géographique est un critère déterminant.
Le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu a promis de baisser le coût de la labellisation de 447€ (sur trois ans) à 200€. Il s’est engagé à imposer un délai maximum de trois mois d’instruction du dossier de labellisation, ainsi que des délais de remboursements de l’avance du bonus par les réparateur·ices aux consommateur·rices en moins de deux semaines. Il s’agit désormais de tenir les promesses et de soutenir les artisan·es.
Les réparateur·rices voient néanmoins une opportunité dans le label Quali’Repar. Ils citent des avantages tels que réduire les tarifs de réparation (23%), augmenter leur clientèle (21%), augmenter leur chiffre d’affaires (20%). Près de 40% des réparateur·rices répondant·es ont affirmé que l’adhésion au dispositif avait engendré une augmentation de leur chiffre d’affaires.
Par ailleurs, 85% des réparateur·ices labellisé·es répondant·es déclarent ne pas avoir augmenté leurs tarifs.
Des mesures attendues pour obtenir les impacts escomptés
À partir de ces constats, HOP formule dans ce rapport sur le bonus réparation plusieurs recommandations :
- Donner à tous les réparateur·rices les moyens de rejoindre et bénéficier du dispositif : diminuer ou supprimer son coût, en particulier pour les petites structures ; évaluer l’impact des nouvelles mesures entrées en vigueur ; valoriser le label.
- Rendre éligibles au bonus les pannes logicielles et les pièces indispensables au bon fonctionnement du produit
- Diffuser un message clair aux consommateur·rices et réparateur·rices: développer massivement la communication à l’échelle nationale et imposer une coordination et des critères communs entre éco-organismes (Ecologic, Ecosystem, Refashion).
- Institutionnaliser le Conseil national de la réparation (CNR) pour améliorer la gouvernance du fonds réparation, construire et partager des statistiques nationales publiques sur la réparation.
L’association HOP appelle citoyen·nes et réparateur·rices à continuer de témoigner sur leur expérience des fonds réparation (textile, électriques et électroniques) sur le site d’information qu’elle a lancé : www.bonusreparation.org
En parallèle, les consommateur·ices et réparateur·ices interrogé·es estiment que d’autres mesures sont nécessaires pour encourager la réparation
- l’interdiction des pratiques de sérialisation qui empêchent de réparer certains produits en dehors des réseaux agréés
- rendre les pièces détachées accessibles
- mettre en place une TVA réduite sur la réparation
- ou encore interdire la mise sur le marché des produits dont l’indice de réparabilité est inférieur à un certain seuil
Auteur·trices du rapport sur l’impact du bonus réparation
Rémi Beulque est enseignant-chercheur en sciences de gestion à l’ISC Paris, chercheur associé au CGS-i3 de Mines Paris-PSL et à l’Institut territoires circulaires (ITC), ainsi que praticien de l’économie circulaire. Il effectue régulièrement des expertises auprès d’acteurs privés, publics ou issus de la société civile.
Helen Micheaux est enseignante-chercheure à AgroParisTech en sciences de gestion. Ses sujets portent sur la responsabilité sociale et environnementale des entreprises et leur transformation vers l’économie circulaire et la durabilité.
Laetitia Vasseur, co-fondatrice et déléguée générale de HOP
Flavie Vonderscher, responsable de plaidoyer chez HOP